« L’injonction à l’assimilation pour la naturalisation correspond non seulement à la soumission à un ordre, mais aussi à un critère étatique conditionnant l’entrée dans la communauté nationale. »
Les frontières des États-nations se traduisent par la séparation entre les nationaux et les étrangers. La procédure de naturalisation permet aux étrangers d’appartenir à la « communauté nationale », mais cela passe par la démonstration de leur assimilabilité.
La notion d’assimilation constitue en effet la matrice du droit de la nationalité, et le « défaut d’assimilation » est un des principaux motifs de refus de naturalisation des candidats à la nationalité française. Promue sous l’Empire colonial, cette notion polysémique permet à la communauté nationale de maintenir la distinction entre les Français blancs de métropole et les Autres.
Si l’on met de côté la connaissance de la langue, les principales motivations avancées pour caractériser ces défauts d’assimilation touchent aux questions du hijab, de la polygamie et de l’« islamisme ».
Grâce à une enquête ethnographique minutieuse en préfecture, Abdellali Hajjat met en lumière l’invention de ces critères et les usages administratifs qui en sont faits. Il réalise ainsi une socio-histoire des usages juridiques et administratifs de l’assimilation et trace la généalogie de la frontière nationale, qui peut se confondre avec une frontière raciale.
Abdellali Hajjat est sociologue à l’Université libre de Bruxelles et membre du Groupe de recherche sur les relations ethniques, les migrations et l’égalité. Il a notamment publié La Marche pour l’égalité et contre le racisme (Amsterdam, 2013) et co-écrit Islamophobie. Comment les élites françaises fabriquent le « problème musulman » (La Découverte, 2022 [2013]).