Qui se soucie encore aujourd’hui des affres de la bureaucratie ? Ce mot, qui évoque Kafka et Le Château, semble quasiment tombé en désuétude, comme relégué à l’époque lointaine du socialisme soviétique. Et pourtant, ne passons-nous pas une part de plus en plus grande de notre temps à remplir des formulaires absurdes et à effectuer toujours plus de démarches administratives qui nous gâchent la vie ? La bureaucratie ne serait-elle pas en réalité devenue omniprésente, au point que nous n’en avons même plus conscience ?
À contrepied des idées reçues, l’anthropologue David Graeber s’appuie sur des anecdotes personnelles et des exemples concrets pour interroger notre rapport à cette « zone blanche de l’imagination » et développer la thèse suivante : et si, sous couvert de libre-échange et d’assouplissement des règles, le néolibéralisme entretenait en fait son pouvoir à travers la violence structurelle d’une « bureaucratisation totale » ?
Une réflexion passionnante qui permet enfin de penser cet impensé qui façonne nos existences, et que l’auteur voit comme un efficace bras armé du capitalisme financier.