Brunswick (Géorgie, États-Unis), février 2020. Ahmaud Arbery fait son footing dans un quartier résidentiel. Pour le voisinage blanc, ce jeune homme noir qui court est suspect. Traqué, il sera tué à bout portant, à l’âge de 25 ans.
La loi et l’ordre racial retrace l’histoire de ce crime et de ses procès, qui ont failli ne pas se tenir, n’étaient les vidéos prises par les assaillants eux-mêmes. David Diallo montre, à travers cette affaire à rebondissements, de son classement comme « homicide justifié » jusqu’aux multiples condamnations des meurtriers, tous les obstacles qui ont dû être surmontés avant que la justice ne soit rendue.
Il décrypte l’imaginaire raciste et suprémaciste blanc qui rend possible de tels actes et le sentiment d’impunité de leurs auteurs, à travers une généalogie richement documentée des dispositions juridiques qui encadrent, ou plutôt encouragent, aussi bien le port d’armes, la « légitime défense » dans une acception extraordinairement étendue, que l’« arrestation citoyenne », terreau des abus de justiciers autoproclamés et de la persistance des meurtres par lynchage.
Les lois et la jurisprudence qui les favorisent, de même que la large exclusion des Africains-Américains des jurys, sont ancrées dans une histoire judiciaire et culturelle de discriminations de fait, voire de droit, issue des périodes esclavagiste et ségrégationniste, perpétuant une violence dont les personnes noires restent proportionnellement les principales victimes.
Ce livre propose donc de détailler le constat dressé par Martin Luther King Jr., Malcom X, Fred Hampton, Angela Davis et bien d’autres figures emblématiques du combat pour l’égalité des droits dont le mouvement Black Lives Matter est le dernier représentant en date, à savoir que le système de représentations du Noir comme menace dans la société américaine (pour la femme blanche, pour la classe ouvrière blanche, pour une préséance blanche et ses intérêts de classe, de genre…) a, dans un premier temps, infecté un imaginaire national.
Un imaginaire au cœur duquel est solidement gravée la croyance que la valeur d’un Noir serait moindre que celle d’un Blanc, qu’un Noir serait « naturellement » moins doué et moins méritant qu’un Blanc, que ces différences justifient son contrôle, son asservissement, sa répression par le lynchage, son exclusion du droit, son incarcération et sa persécution.