Les fantômes ne sont pas comme on les dit des ombres mais s’ils persistent c’est que la douleur de leur mort violente ne s’en va pas et son écho aigre se perpétue dans le temps. Ainsi naît le fantôme du décapité dont la demi-vie n’est que la plainte éternelle et aigüe qui lancine dans sa gorge. La noyée suffoque éternellement et le pendu l’accompagne. Les fantômes ne sont pas des ombres mais des plaintes qui par trop de douleur ne s’épuisent pas.
Entre les murs d’un tribunal, plusieurs voix s’élèvent. L’affaire jugée aujourd’hui est celle d’un féminicide comme il en arrive des centaines chaque année. Une narration polyphonique fait tour à tour entendre les témoins, le meurtrier, le journaliste, l’avocat, la sœur, le policier, la sociologue ou encore les féministes rassemblées devant la salle.
Chacun·e vient partager un bout de cette histoire, une vision d’un monde structuré par les dominations patriarcales et la violence sexiste.
Dans ce tribunal narratif, c’est la justice elle-même que l’autrice vient mettre en cause, autant que l’oppression systémique. Et comme le dit l’absente dans une ultime lettre : « Réclamez justice mais non celle d’aujourd’hui, un autre type de justice qui ressemble à nos vies et sache y répondre. »