« À tous égards, Roxy était aussi blanche que n’importe qui, mais ce seizième de noir prenait le pas sur les quinze autres parts et faisait d’elle une Négresse. Une esclave et donc, de fait, vendable. Son enfant, malgré les trente et une parts de blanc qu’il portait en lui, était également esclave et donc, par simple présupposé de la loi et de la coutume, un Nègre. Il avait les yeux bleus et des boucles couleur de lin à l’image de son compagnon blanc. Néanmoins, pour aussi peu qu’il fût en commerce avec eux, même le père de l’enfant blanc était capable de les distinguer l’un de l’autre – par le truchement de leurs vêtements : le bébé blanc arborait une douce mousseline tout en ruches et un collier en corail tandis que l’autre ne portait aucun bijou, juste vêtu d’une chemise grossière en toile d’étoupe de lin qui lui descendait à peine aux genoux. »
Avec Wilson Tête d’oeuf, roman qui met en scène l’échange entre un fils d’esclave et le fils de son maître, Mark Twain reprend le thème de la ségrégation raciale, déjà présent dans Les Aventures de Huckleberry Finn, à l’aune d’un nihilisme radical. Sous couvert d’une farce, il montre l’impossibilité pour tout Américain, quelle que soit sa couleur de peau, de sortir d’une culture imprégnée de racisme.
Nouvelle traduction de Freddy Michalski, texte intégral
Illustré de gravures de Sarah d’Hayer
Précédé d’une préface de Jean-Luc A. d’Asciano (longuement) intitulée :
Un écrivain américain blanc né en 1835 peut-il écrire une fiction autour du racisme sans véhiculer des clichés racistes ? Et une fiction sur le racisme peut-elle honnêtement proposer une rédemption à ses lecteurs blancs ? (préface contenant moult révélations sur le récit, que vous pouvez aussi lire en postface)