David Frayne trace d’abord une limpide théorie historique du travail, convoquant Calvin, les grands utopistes, Marx, Keynes et de nombreux autres jusqu’à André Gorz. Son but est de mettre en évidence la construction progressive du travail comme alpha et omega de notre insertion dans la société, et la « provocation » que constitue, de fait, l’idée de défendre une autre vision du bonheur. L’aliénation du travail contraint, les souffrances psychiques ou physiques, ne sont que quelques-unes de facettes de l’envahissement irrépressible de notre liberté par de soit-disant besoins économiques.
Mais il serait simple de refuser une telle contrainte si le travail ne jouait pas aussi le rôle d’une forteresse pour ceux qui s’y plient, protection autoproclamée contre le chômage et son stigmate, promettant inclusion sociale et bonne santé. David Frayne a enquêté auprès de personnes qui ont renoncé à chercher du travail : quel a été le moment de bascule, comment vivre en étant considéré comme incomplet ou inutile, quelles nouvelles perspectives s’ouvrent ? Il s’interroge : ces parcours ne contiennent-ils pas le ferment d’une alternative politique, donnant des armes pour imaginer une forme plus robuste et plus authentique de liberté ?