Traduit de l’espagnol par Manuel Martinez
Préface de Luis Andrés Bredlow
L’État a fusionné avec le Capital. L’homme est devenu marchandise. Dans la religion de l’Économie, un seul Dieu est vénéré : l’Argent. Un seul idéal subsiste : le Développement. Et cette société mue par le sacro-saint critère de Rentabilité se présente comme la meilleure, la seule possible, réalité indiscutable, où tous les individus réduits à l’état de ressources souriantes se doivent d’accéder à un Bien-être hégémonique. Comme si la finalité de l’existence était de crouler sous une abondance de substituts, d’ingurgiter toujours plus d’ersatz. « Les biens du Bien-être ont le goût du vide », s’élève Agustín García Calvo dans ce pamphlet percutant, aux accents situationnistes. Pour en finir avec le régime de la falsification, il suffit de ne plus y croire. De ne plus parler le langage de l’économie. Dire NON, la vie est ailleurs que dans les illusions mercantiles de notre temps.
« Qu’adviendrait-il de l’Argent, de la Banque, de l’immense commerce du Réseau Informatique Universel, si un manque de foi se propageait parmi les gens, si un soupçon venait assaillir chacun d’entre nous avec une certaine fréquence et intensité, un soupçon sur ce qui circule sur le Réseau Informatique Universel, ce qui maintient la Bourse, ces choses que l’on va chaque jour acheter à la Banque, pareils à des enfants qui s’échangent des images, mais avec le plus grand sérieux, comme si la vie s’y jouait ? L’Argent, aussi puissant soit-il, n’y pourrait rien. N’importe quelle forme de Dieu a besoin de Foi : plus sa réalité est haute, plus il est sublime, et plus il a besoin que l’on croit en Lui. »
Agustín García Calvo (1926-2012) est un auteur espagnol prolifique, philologue, linguiste, poète, dramaturge et essayiste. Cet anarchiste éclectique, toujours sur la brèche (il participait encore au mouvement des Indignés quelques mois avant sa mort), se veut le porte-voix des gens communs.