On a pu faire cette remarque, à propos de Champ Libre, que pour la première fois une maison d’éditions soulevait des passions parmi des gens qui ne savaient pas lire. Des passions forcées de rester lointaines sont généralement malveillantes. Le spectateur contemporain oublie systématiquement l’évidence, dogmatise à partir des rumeurs qu’il a lui-même inventé, et déraisonne aveuglément sur ses propres falsifications.
Champ Libre cependant, pour dissiper d’un coup toutes les rumeurs qui l’entourent, n’a qu’à publier sans autre commentaire la part de sa correspondance qui revêt un caractère polémique.
Des éditions ne sont pas seulement définies par les auteurs qu’elles acceptent ou qu’elles repoussent, mais encore par la manière dont elles les acceptent et les repoussent. Jamais jusqu’ici les éditeurs, préoccupés de rentabilité commerciale ou soucieux de certains ménagements politiques, n’avaient, croyons-nous, entrepris de placer leur activité sous une lumière si révélatrice.