Le cimetière juif de Thessalonique, avec plus de 300 000 tombes, fut le plus grand d’Europe. La ville, ottomane depuis 1430 – « Salonique » en turc –, avait accueilli en 1492 les juifs chassés d’Espagne. La moitié de sa population était juive et conservait l’usage du judéo-espagnol ou ladino.
En 1942, sous l’occupation nazie, le cimetière juif est exproprié. Les pierres tombales seront employées pour la construction, aussi bien par les Allemands que par les Grecs. Aujourd’hui, on les retrouve disséminées dans toute la ville et au-delà.
En 1943, près de 45 000 personnes, soit 96 % de la population juive de la ville, sont déportées. La plupart furent assassinées au camp d’Auschwitz-Birkenau.
Martin Barzilai, petit-fils d’un juif salonicien parti à temps, s’est rendu à Thessalonique à la recherche de ces tombes, de ces traces qui résistent à l’oubli, qui persistent. Il a enquêté, photographié et interrogé les derniers témoins et les personnes habitées par cette mémoire fantôme.
Les historiennes Annette Becker et Kateřina Králová situent cet ensemble d’empreintes visuelles dans l’histoire des Balkans et dans le contexte de la mémoire contemporaine des guerres et des génocides du XXe siècle. Comment se révèle cette histoire en morceaux, dans une même ville, entre présence et disparition ? Comment est-elle vécue aujourd’hui ?